Drôle de couple

Rencontres imaginaires avec des êtres réels 3

Après mon spasme télépathique chez le pape démissionnaire[1], j’ai calé ce qui restait de ma première bière. Désaltéré, j’ai laissé vagabonder mon regard alentour. L’endroit était presque désert. Cela était peut-être normal un mardi après-midi d’hiver. Tellement de choses m’étaient inconnues, méritaient que je m’informe, pour comprendre comment vivaient les gens de cette époque. Graduellement, je trouverais réponse à mes interrogations.

J’ai remarqué alors deux personnes qui venaient d’entrer. Ils ont pris place à quelques tables de la mienne. Une femme et un homme… Un humain normal n’aurait pu entendre leur conversation, volontairement tenue à voix basse. Mais je constatai que, même réincarné, j’avais conservé certains pouvoirs acquis dans l’éther.

Sans même que je l’aie commandée, une seconde bière s’est posée devant moi. Quand j’ai levé les yeux vers la serveuse, elle m’a gratifié d’un magnifique sourire en clin d’œil. Décidément, je ne m’étais pas réhumanisé ici par hasard.

J’ai bu une gorgée, durant laquelle mon attention est revenue vers le couple. C’est par pure curiosité que je me suis intéressé à leur propos. J’étais toujours en phase d’intégration. Afin de ne pas me faire remarquer pour de mauvaises raisons, j’avais intérêt à mieux connaître la société où je venais d’apparaître. Mieux valait rester sur le mode de l’écoute. Cela dit, j’ai vite compris que l’échange dont j’allais être témoin sortait de l’ordinaire.

Après qu’ils eurent été servis, la dame a lancé la conversation.

– Merci d’avoir accepté mon invitation, a-t-elle dit, faussement reconnaissante.

– Avais-je le choix ? A répondu l’homme sur un ton sec.

– Pas vraiment…

– Vous êtes mieux informée que je l’aurais cru.

– Merci…

– Cela dit, je ne comprends pas où vous voulez en venir. Pourquoi insister pour me voir, incognito, en me menaçant d’un sordide chantage. Vous savez, j’ai aussi des informations compromettantes sur vous.

– Je n’ai pas peur. Vous m’avez déjà fait assez de tort sur la place publique. Que pourriez-vous faire de pire ?

– En me faisant venir ici de force, qu’est-ce que vous vous imaginez obtenir ? Désolé, mais je ne crois pas que le chantage soit la meilleure façon de faire avancer votre cause.

– Mais le fait est que vous êtes là, en personne, assis à mes côtés.

– Là n’est pas la question.

– Voulez-vous revoir la liste des milliers de gens que votre entourage fait chanter ? Je n’ai fait qu’utiliser vos méthodes. Pourquoi se gêner quand l’exemple vient de si haut ?

Silence inconfortable du type, qui cache sa nervosité en entamant sa bière. La femme est calme, sûre d’elle, ce qui a pour effet d’énerver davantage son vis-à-vis. Elle entend jouer cette carte à fond.

– Votre déguisement est assez réussi. C’est fou comment une perruque et un vieux complet élimé changent l’allure d’un homme.

– Assez… Venons-en au fait. Pourquoi cette mascarade ?

– Du calme. Nous ne sommes pas pressés.

La dame prend le temps de sortir la pochette de menthe infusée de la petite théière. Elle boit lentement quelques gorgées. Face à elle, l’homme est nettement déstabilisé par la situation. Lui qui est habitué à tout contrôler, à obtenir tout ce qu’il veut; il se trouve aujourd’hui dans la position inverse. Cela l’horripile mais, en même temps, il ne sait comment agir pour retourner la situation à son avantage.

Devinant comment il se sent, elle lève la tête, le regarde droit dans les yeux et laisse éclore son sourire. Elle est consciente de blesser son interlocuteur, de l’enfoncer davantage dans son malaise. Elle savoure l’instant, prolonge regard et sourire jusqu’à ce qu’il rougisse. Pour une rare fois, dans sa vie, elle se sait volontairement méchante. Sauf dans des cas extrêmes, elle a toujours détesté manier l’arme psychologique. Il s’agit, indéniablement, d’un cas extrême.

Après un temps, elle reprend, grave, sur le ton que l’on réserve aux vérités profondes.

– Ma cause, comme vous dites… sans réussir à masquer votre dédain pour ce genre de lutte… c’est le sauvetage de mon peuple et de tant d’autres peuples que les blancs ont tout fait pour exterminer, sur le continent, depuis plus de 500 ans. Ma cause… À vous entendre, on dirait le lobby d’un vendeur d’assurance. Vous êtes pas gêné… On pourrait croire que mon jeûne est un échec, puisque je n’ai pas obtenu la rencontre tant espérée avec vous et le représentant de la reine. Mais, nous l’oubliez pas, nous avons réussi à porter l’attention de tous sur notre sort immonde. Mes frères et sœurs se réunissent, manifestent, se soulèvent… Ce n’est qu’un début. Vous avez tellement à vous faire pardonner…

L’émotion la gagne, ce qu’elle cache en prenant une gorgée de son thé. Son interlocuteur n’ose pas intervenir.

– Après nous avoir traité comme des animaux, après nous avoir saoulés, asservis, contaminés, aculturés, vous nous avez parqués dans de minuscules réserves. L’église catholique s’est occupée de miner notre spiritualité, qui faisait parfaitement notre affaire depuis des milliers d’années. Depuis, vous ravagez le continent… Nos jeunes sont malades, nos hommes aussi, et des centaines de mes sœurs sont harcelés, violées, assassinées en toute impunité. Plusieurs communautés n’ont pas même l’eau potable. Question de vous sentir moins coupable, vous nous inondez d’argent. Mais nous avons du mal à gérer ces biens. Trop de communautés n’ont pas accès à la formation qui permettraient de nous en sortir. Alors, nous faisons des erreurs. Et vos fonctionnaires nous tapent sur les doigts, pour nous punir, comme les missionnaires faisaient il y a un siècle. Le travail à accomplir pour réellement améliorer la situation est monstrueux… Il faudrait mettre en place une approche complètement nouvelle, ouverte. Mettre du temps, de l’énergie… Mais, dans votre stratégie, nous ne sommes qu’une infime denrée électorale. Et dans votre propagande, nous sommes seulement bon, à l’occasion, pour rehausser votre image de marque…

Silence, avant qu’elle poursuive.

– Vous n’avez pas honte ?

Il n’ose pas ouvrir la bouche.

– Pendant six semaines, j’ai ingéré seulement de la soupe de poisson et des tisanes. Il vous a fallu plus de trois semaines avant de vous intéresser à moi, avant de daigner organiser une rencontre avec les collègues. Votre réaction est venue trop tard. Vous nous avez fait trop attendre…

Elle le regarde, émue. Elle terminera la prochaine phrase sur le bord des larmes.

– Vos ancêtres, comme vous, ne méritez pas ce continent… De la Terre de Baffin à la Terre de feu, vous avez usurpé la terre. Depuis, vous la découpez, la vendez, la saccagez. Mais rappelez-vous ceci : elle ne vous appartient pas, ne vous appartiendra jamais. Un jour, les blancs paieront pour ce massacre. À commencer par vous, Monsieur Harper… La terre se vengera.

Le premier ministre du Canada, méconnaissable pour les autres clients et le personnel, boit sa bière nerveusement, à petites gorgées.

– Vous voudriez que je fasse quoi ?

Elle hésite avant de répondre.

– Êtes-vous prêts à convoquer une assemblée spéciale, formée de représentants de toutes les premières nations, des provinces et territoires, de votre gouvernement, sous observation d’une délégation internationale de l’ONU, qui s’attaquerait à une révision et mise à jour de tous les traités, à une refonte totale de la loi sur les Indiens, au partage équitable du territoire, des ressources et des processus de décision, à l’intégration constitutionnelle des autochtones à la Chambre des communes, au Sénat, dans les parlements des provinces et des territoires, dans le but de régler enfin le contentieux qui désavantage les Premières Nations depuis la Nouvelle-France ?

– Pardon ? J’ai bien entendu ?

– Oui.

Piqué au vif par l’ampleur de la demande, le PM a retrouvé un peu de sa superbe.

– Vous êtes folle ou quoi… C’est énorme, ce que vous demandez là. Je n’ai pas la légitimité pour lancer un tel chantier. Je n’ai pas été élu pour ça.

– Votre réponse est tellement prévisible. Quelle petitesse… Pourtant… C’est désagréable de brandir une telle arme, mais avec la liste que j’ai…

– C’est tout le pays que vous voulez foutre en l’air.

– Pourquoi pas ? Combien de nations ont subi un tel sort ?

Elle boit la dernière gorgée de sa tisane.

– Pensez-y bien. Je vous donne une semaine pour me répondre.

Theresa Spence regarde une dernière fois le premier ministre, se lève et, d’un pas solennel, va vers la porte. Elle quitte le bar sans dire plus ni regarder une seconde le politicien, qui reste immobile, abasourdi. Il n’a probablement pas compris le message. C’est au-delà de ses forces émotionnelles et intellectuelles de comprendre ce niveau d’humanité. Mais il est ébranlé, cela se voit. Il finit sa bière rapidement, paie, et quitte à son tour, s’engouffrant dans la limo noire garée devant la porte.

Je vous ai dit, plus haut, comment cette rencontre sortait de l’ordinaire.

Stephen Harper se rappellera toute sa vie de sa rencontre improbable et incognito avec Theresa Spence, chef autochtone rendue célèbre par son jeûne de la fin 2012 et du début 2013. Le conservateur en chef n’aura pas, toutefois, comme le pape Ratzinger à la même époque, la décence de démissionner. Lui qui se disait si bon chrétien aurait dû suivre l’exemple de sa sainteté. S’il avait su que les Premières Nations allaient poursuivre le mouvement Plus jamais neutre, que la question autochtone, avec d’autres dossiers, évoluerait sur la place publique jusqu’à faire tomber son gouvernement, quelques années plus tard, peut-être aurait-il agi autrement. Dans le meilleur scénario, pour la plupart de ses concitoyens, surtout au Québec (ils ne semblent pas l’aimer beaucoup, par là), il aurait bien pu disparaître pour toujours, en sortant du bar, perruque et complet élimé inclus.


[1] Voir Rencontres imaginaires 2. Pensée inavouable.

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Pensée inavouable

Rencontres imaginaires 2

Après moult réflexion, je suis réapparu sur terre dans un bar, lieu idéal où me réincarner dans l’anonymat. Dans un coin obscur, adossé au mur à une petite table ronde, j’ai graduellement pris conscience. Ni le barman, ni les quelques clients ne semblaient avoir remarqué mon apparition. Ou ils faisaient semblant de ne pas avoir remarqué, car j’avais l’impression de les voir sourire dans leur barbe. C’était étrange. Très… Surtout avec le bock de bière fraîche qui attendait à portée de main.

J’ai siroté ma première bière depuis des siècles. Un grand bonheur…

Après un temps passé à me familiariser avec mon nouvel état de conscience – plein de sensations diffuses que je reconnaissais vaguement – j’ai remarqué un grand rectangle, comme suspendu dans le vide au-dessus du comptoir, sans comprendre de quoi il s’agissait. C’était comme un dessin, avec des personnages plein de couleurs, mais en mouvement. Je n’avais jamais vu telle chose. Pour faire court, j’allais savoir bientôt qu’il s’agissait de l’écran géant suspendu au dessus du zinc, où on présentait les nouvelles du jour.

En gros plan, la tête d’un homme.

Précautionneux, incertain de comment sonnerait ma voix si je m’adressais à quelqu’un, je n’osais demander à personne qui il s’agissait. Partant de son image, j’ai fermé les yeux en me demandant si mon pouvoir télépathique était toujours actif.

Il l’était.

Dans une sorte de vapeur qui se dissipait lentement, j’ai reconnu le même homme qu’à l’écran. Il était seul et nu, assis, enveloppé à la taille d’une grande serviette. Il suait, avait chaud, très chaud. Étions-nous dans un bain public ? C’était difficile à dire, pour moi, car je n’avais encore jamais vu de salle de bain privée. Le lieu était assez petit. Très orné. Autour du type, il y avait des tentures de couleur rouge, lourdes, sombres. Un grand bain. Une vanité de marbre. Sur un des murs, un grand miroir où se réfléchissait le baigneur. La lumière tamisée émanait de cierges placés aux bons endroits pour créer un effet dramatique.

J’ai constaté tout de suite que l’homme était préoccupé. Il réfléchissait. Un peu comme moi avant de frapper le mur de l’ennui[1]. Cheveux gris et courts, visage rond, ridé, il avait l’air très vieux. Il était assis sur une banquette de bois, d’allure artisanale, qui jurait avec le luxe du mobilier. Ses épaules et son torse étaient voûtés vers l’avant. Il avait la peau rougie, parsemée de poils blancs. Son ventre, affalé sur ses cuisses, était flasque de peau vieille.

Manifestement, l’homme se souciait peu de son maintien. Tout replié sur lui-même, il n’aurait jamais deviné qu’il était observé. Je me suis vite rendu compte qu’il était au prise avec un dilemme profond, comme en lutte avec une vision, une pensée qu’il réprouvait, qu’il voulait rejeter, mais dont il ne réussissait pas à se défaire. Il ne croyait pas en arriver là, mais il semble bien que sa position devenait inéluctable. Lui qui, n’ayant plus rien à prouver, se préparerait dorénavant à mourir, approchant de cette ultime échéance, il constatait la vanité de sa vie. Grosse comme une pierre approchant à toute vitesse de son œil, il voyait l’erreur fondamentale dans laquelle il s’était fourvoyé tant d’années.

La foi chrétienne était une chimère… Malgré toute sa sagesse, sa science, sa volonté. Malgré la puissance de l’Église, du Vatican, de tous les saints du ciel : Dieu n’existait pas. La science avait raison, faisait foi de tout. Il n’y avait de vrai que la matière. Après son dernier souffle, hormi la mémoire de l’humanité, sa vanité se dissiperait entièrement dans l’éternité. Niet le ciel, les anges, Saint-Pierre, le paradis… Niet la résurection, la rédemption des âmes et toutes ces foutaises.

Ce sentiment l’avait envahi graduellement, depuis quelques années. Il en était maintenant convaincu.

Sublime ironie !

Lorsque ma conscience a réintégré le bar, quand j’ai revu l’écran de télévision, le visage du baigneur noyé dans le doute était toujours là. Dans le bas de l’image, on pouvait lire ceci : « Le pape Benoit XVI a annoncé aujourd’hui qu’il allait démissionner. »


[1] Voir Rencontres imaginaires 1. L’esprit errant.

L’esprit errant

Rencontres imaginaires 1

Après avoir consacré un temps incalculable à la méditation, je m’étais tranquillement mué en un insoluble chaos de questions. J’ai mis du temps à m’en rendre compte, mais je m’étais perdu dans une sorte de mælstrom, brouillard tourmenté d’idées vaines. Tant que j’ai cru avancer dans ma quête, réfléchir sur la nature fondamentale de l’existence m’a procuré une immense satisfaction. Dès lors que cette activité s’est butée à un cul-de-sac, mon univers ne tenait plus. La conclusion s’imposait : il était temps de passer à autre chose. Fallait que je sorte de mon cocon, de mon antre, de mon refuge.

Pour paraphraser un intellectuel habile au cinéma, forme d’art que j’ai découverte sur le tard, le confort mène à l’indifférence, qui elle même se mue – quand plus rien ne parvient à éveiller, ou même à soutenir, notre intérêt – en un incommensurable ennui… Ce type habite votre contrée terrienne, au nord, entre les atlantes et le pacife, où votre petit peuple rue comme il peut pour se tailler une place dans le concert des nations. Contrée terrienne, peuple, nation… Je sais, voilà autant de concepts difficiles à saisir, du moins là où j’ai établi résidence. L’esprit vagabond ne s’intéresse guère à de tels notions. Mais bon… Si je veux « voir du pays », comme vous dites encore, faudra bien que je renoue avec ce système de pensée.

L’ennui, comme j’ai dit, était devenu total. Depuis des lunes… Et vous n’avez pas idée combien longtemps elles durent, nos lunes. En temps humain, chacune mesure sa petite éternité.

Quand ma décision a été prise, de nouvelles questions se sont ajoutées à la multitude. Au moins menaient-elles vers une issue. Le principal écueil auquel j’étais confronté : il n’est pas possible de simplement me poser là, au milieu d’une de vos voies publiques, ni de me matérialiser dans un salon de classe moyenne devant une famille écoutant le hockey. Votre peur de l’autre est atavique, profonde; la réaction en me découvrant serait probablement excessive. Mes observations préliminaires confirment d’ailleurs ce que théorisent en détail les encyclopédies : les terriens ne semblent pas très ouverts à l’inconnu. Je devais diminuer le risque, faire preuve de subtilité. Avant de me montrer, d’abord faire enquête, explorer, apprendre à vous connaître.

J’ai donc procédé lentement, à tâtons. Les humains sont si différents l’un de l’autre. Entre un dirigeant politique bedonnant d’avoir engraissé sa caisse occulte, une activiste pour la paix dopée d’idéal, un entrepreneur cupide, un héros sportif, une vedette populaire, un bébé naissant ou de jeunes adolescents; à qui allais-je m’adresser en premier ? Certains spécimens semblent particulièrement idiots, mais peut-être s’agit-il d’une façade, et, blottie derrière, une riche personnalité vaut la peine. D’autres font montre d’une intelligence supérieure, mais consacrent leur vie à d’abominables atrocités. Depuis mes derniers contacts avec l’humanité, il y a fort longtemps, j’ai découvert qu’une incroyable variété de spécimens avait proliféré. Magnifiques, dangereux, ordinaires, etc…

La petite théorie que j’ai échafaudée est à l’effet que si l’humanité, dans son ensemble, montre un certain équilibre, c’est au prix d’une variation infinie au sein de la population des individus. Le centre regroupe la vaste majorité des gens, pour la plupart de bonnes âmes, ouvertes et généreuses, bien que craintives et, surtout, pétries d’habitudes. Ce sont les extrêmes qui font peur. Et ces extrêmes se bousculent tout autour du centre. Il y a ceux qui cultivent la violence, le conflit, misant sur la force brute pour obtenir gain de cause. Ceux qui défendent bec et ongles leur clan, au détriment de tous les autres. « Vous êtes avec nous ou contre nous… ». Plusieurs pays sont dirigés par de tels bornés, apôtres de la propagande. À proximité, il y a ceux qui croient en cet espèce de principe unique, Dieu. Croire en lui permet toutes les licences… Comment est-il possible de prêter si grand pouvoir à une idée ! Car quiconque ouvre les yeux et scrute objectivement l’univers conclut inéluctablement que ce Dieu, qui mène par le bout du nez des milliards d’humains, n’existe tout simplement pas.

Croyez-moi, je suis bien placé pour le savoir.

En effet, lors de mon précédent passage sur terre, j’ai moi-même succombé au divin. Séduit par la foi, après quelques tentatives chrétiennes, j’ai embrassé le bouddhisme, qui, réincarnation après réincarnation, m’a mené patiemment vers le nirvana. Des siècles de travail… Et c’est là, dans cette supposée plénitude, après m’être fouillé le nombril pour appréhender le sens profond de l’existence, à la recherche de Dieu, que j’ai finalement trouvé l’ennui. L’ennui intégral… La pratique rigoureuse de Dieu m’a mené au vide.

Pourquoi donc retourner sur terre ? Une bonne bière fraîche… C’est dans un bar que je devrai réapparaître.